Deus Ex : Human Revolution, tests & avis croisés
Deus Ex : Human Revolution a été certainement l’un des jeux les plus attendus de l’année, et ces très bonnes ventes en magasins et en dématérialisé l’ont prouvées. Il faut dire que Eidos Montreal, développeur du jeu, a su se faire attendre.
Annoncé en 2007 pour une sortie attendue pour novembre 2009, finalement reportée à mars 2011, puis avril 2011, il est sorti finalement au mois d’août dernier : 4 ans d’attente depuis l’annonce, mais surtout 11 ans depuis le premier Deus Ex, œuvre monumentale du jeu action RPG pour son scénario et son ambiance cyber-punk digne de Blade Runner.
Alors, est-ce qu’on a vraiment affaire au digne successeur de Deus Ex premier du nom, ou le jeu suit-il le mauvais exemple de Deus Ex 2 : Invisible War ? Réponse tout de suite dans ce test.
Bon, petite particularité, on va essayer avec Mandar de faire un test croisé, chacun donnant son avis sur le jeu. Vous verrez que nous divergeons sur certains points, et nous avons pensé qu’il était dommage de vous priver du débat qu’il pourrait y avoir là-dessus. Pour ce test, j’ai personnellement joué à la version PC de DxHr, sur une machine sur le retour, donc mon avis sur les graphismes sera à prendre avec des pincettes. Je tiens également à préciser que je n’ai pas joué aux premiers Deus Ex, je ne pourrais donc pas faire de parallèles entre les deux précédents jeux de la franchise.
Comme l’exprime ce très cher Fluh, nous allons tenter de vous livrer nos deux visions de ce jeu qui fait office de blockbuster pour cette fin d’année. J’ai personnellement placé probablement trop d’espoirs dans celui ci. Même si je ne conteste pas que c’est un bon jeu, certaines choses m’ont particulièrement frustrées dans ma progression générale.
Scénario
Une histoire inventive et bien mise en scène
L’histoire du jeu se déroule en 2027, dans un futur où les avancées de la nanotechnologie et de la bio-mécanique ont permis la commercialisation mondiale des augmentations humaines (comprenez des éléments mécaniques permettant de remplacer, d’améliorer ou d’ajouter des parties du corps humains). Le protagoniste, Adam Jensen, ex-flic, travaille dans l’une des compagnies principales de ce marché, Sarif Industries, en tant que chef de la sécurité. Durant une attaque d’un des labos de recherches, l’équipe de Megan Reed, ancienne petite amie de Adam, est tuée, et Adam est laissé pour mort. Pour le sauver, Sarif lui implante de nombreuses améliorations, pour remplacer ces membres et améliorer ces capacités. A son réveil 6 mois plus tard, Adam va se lancer, avec l’aide circonstancielle de Sarif Industries et de ses employés, dans une enquête à la recherche des commanditaires de cette attaque.
Voilà tout ce qu’on peut dire sans vous spoiler le reste de l’histoire. Ce plot, qui peut sembler un peu maigre de l’extérieur, nous emmène dans des ramifications et des détours d’une rare richesse. En s’aidant notamment du contexte du jeu, le scénario prend une très grosse ampleur, en y mêlant diverses organisations, des complots, des secrets. Bref, en mêlant l’histoire personnelle de Adam Jensen, orphelin augmenté contre son gré, luttant pour savoir qui a tué Megan Reed, avec des conspirations dignes des meilleurs romans d’espionnage, les scénaristes de Deus Ex ont effectué un très bon boulot.
Ce scénario est également très bien servi par le principe de liberté d’action du jeu. En effet, par l’intermédiaire de quêtes annexes, de discussions anodines, de journaux, et de mails des ordinateurs piratés, l’histoire s’étoffe, on apprend les détails de chaque élément que l’on avait admis. Bref, cette architecture du scénario à plusieurs niveaux rajoute à ce sentiment de maîtrise qui se dégage de l’histoire et de l’ambiance du jeu.
J’ai personnellement du mal à trouver quelque chose à redire à ce scénario. Les éléments s’enchaînent naturellement, l’histoire nous mène d’étape en étape vers l’une des 4 fins du jeu, et surtout, ce qui est vraiment appréciable, c’est qu’on ne voit pas de grosses ficelles scénaristiques que l’on peut voir parfois dans les jeux d’actions / aventures.
Je n’ai moi-même pas grand chose à rajouter concernant le scénario, on a une histoire intéressante rondement mené du début à la fin, et en étant un vrai fouineur, il est possible de découvrir une perle de plus au milieu de conversation qui vont permettre d’étendre votre connaissance de certains protagonistes ou encore d’en apprendre plus sur Adam Jensen et sa relation à Sarif.
Ambiance et direction artistique
Une ambiance cyberpunk réussie, du moins en surface
On avait pu le voir avec les différents trailers du jeu, l’ambiance du jeu est particulièrement réussie. Le monde est non seulement original, mais surtout vraisemblable. Dès la scène d’introduction, on comprend qu’au final, le marché des augmentations est surtout pensé pour les clients militaires, que les associations et organisations anti-augmentations sont nombreuses, motivées pour stopper ou au moins règlementer le marché, et soutenues par une bonne partie de la population, que les entreprises d’augmentations comme Sarif Industries ont un poids politique certain… Bref, on ne tombe pas dans le manichéisme et dans la caricature.
Cependant, dès que l’on s’attarde un peu sur le jeu, on se rend compte que cette ambiance est un peu superficielle. L’un des exemples les plus flagrants est lorsque l’on écoute les infos. A chaque avancée de la quête correspond un et un seul reportage, d’à peine une minute, qui tourne en boucle. C’est dommage, tout d’abord parce que c’est fatiguant d’entendre en boucle le même discours, mais également car on aurait pu s’attendre à un travail plus approfondi sur ce point, surtout vu le contexte géopolitique et économique développé dans le jeu. Au final, j’ai trouvé que l’on s’appesantait beaucoup trop sur le débat sur les augmentations et pas assez sur le reste du monde.
Outre sans doute l’omniprésence du débat sur l’augmentation, j’ai trouvé également que l’univers manquait réellement de profondeur et ce, à plus grande échelle. Les villes sont des couloirs où la plupart des bifurcations vous offriront une quête, il est très rare de se perdre dans une ruelle et de découvrir un personnage intéressant. Si vous devez trouver par hasard une quête annexe, le personnage sera en évidence sur la voirie même si il ne gesticulera pas violemment pour vous attirer (quoi que…).
Autre point décevant, et beaucoup plus grave, l’IA du jeu est très inégale. Parfois capable des meilleures réactions fassent à un évènement, débordement, stratégie de groupe lorsque vous infiltrez un complexe, elle est également capable de faire vraiment n’importe quoi. Exemple concret : dans le jeu, vous récupèrerez une arme appelée le Prime, qui permet d’étourdir un groupe d’ennemis. Lors d’une des infiltrations, je l’utilise sur 2 gardes, le premier vole à l’autre bout de la pièce, le deuxième n’a rien, se retourne, me voit… se re-retourne et va voir comment va l’autre garde. Enfin, rassurez-vous, les gardes sont assez bons et nombreux pour être un vrai obstacle à la progression.
Cependant, la direction artistique prise est tellement pertinente et immersive que l’on peut passer outre ces écueils. Les différentes maps du jeu sont superbes en terme artistique (nous verrons que graphiquement parlant, le constat est différent), les deux villes modélisées, Détroit et Shanghaï, ont une identité visuelle forte, et les différents protagonistes ont la classe, notamment le héros, qui a un look de badass incroyable.
J’ai personnellement fait le jeu en mode Deus Ex et sans parler d’intelligence vu qu’on parle d’IA (le taunt c’est mal !), j’ai retrouvé une vraie difficulté dans leurs réactions et actions face à l’agression. Toutefois je dois reconnaitre que ceux qui choisiront la discrétion gagneront en « simplicité », une explosion va les faire déplacer mais étrangement après quelques minutes, ils se remettrons gentillement en place.Quand une mine explose à cent mètres de moi j’ai tendance à m’inquiéter plus mais je pense que c’est surtout pour simplifier le jeu. Si je voulais être vraiment sévère, je dois avouer qu’endormir quelqu’un revient à le tuer tant que personne ne voit le corps. Je ne sais pas si j’aurais aimé qu’il se relève quelques minutes plus tard mais ça aurait pu être sympa.
Je rajouterais tout de même une remarque positive, l’ambiance sonore est magnifique…
Graphismes
Le bas blesse
Le développement du jeu a duré près de 4 ans et demi, et malheureusement, comme tous les jeux au développement long, ça se ressent visuellement. Le jeu a 2 ans de retard en terme technique. Certaines textures ne sont pas très détaillées, l’aliasing est omniprésent, les effets d’ombres scintillent parfois… Bref, en un mot comme en cent, les graphismes peuvent rebuter les plus exigeants. Surtout que le jeu souffre parfois de quelques bugs de collisions, et d’une synchronisation labiale catastrophique, au moins en français. Du coup, les scènes de dialogues perdent en réalisme.
Enfin, les cinématiques sont a priori développées avec le moteur graphique sous condition console, et là encore, ce n’est pas particulièrement beau. Les développeurs ont eu la bonne idée de flouter et d’assombrir un peu le résultat, mais ça reste quand même assez loin des standards actuels.
Le jeu n’est pas foncièrement moche sur PC mais alors les cinématique pour moi c’est une catastrophe, on ne voit plus aucun détail, les couleurs virent à du jaune étrange ponctué d’ombres très noires pour cacher sans doute, les animations sont très répétitives et les visage donne l’impression d’avoir été coulés dans le plastique…On sent que le moteur n’est pas récent mais il est plutôt bien maitrisé pourtant. C’est vraiment dommage d’avoir voulu différencier cinématique et jeu alors qu’à la base, sans décrocher des mâchoire, le tout est cohérent et n’agresse pas l’œil.J’ai remarqué quand même une chose : les cartons envahissent le monde de 2027 ! Je vous entends ricaner mais c’est une réelle invasion. Dans toutes les pièces il y a un carton, partout où un vide aurait pu ennuyer le joueur, ils ont décidé de placer cet étrange boite. Alors je ne sais pas pourquoi mais je trouve choquant que tous les appartements soient en démanagement ou encore que dans une clinique, on se permette de laisser trainer par terre ce genre d’objet… Serait-ce une preuve d’un manque de finitions ?
Personnellement, je trouve que ce que le jeu perd en beauté technique, il le gagne grâce à sa direction artistique et son ambiance. Même si au début ça m’a un peu déçu, au final, pris dans l’histoire, on en oublie vite les tares techniques.
Gameplay et Gamedesign
Un panel de possibilités pour un sentiment de liberté absolue
Au niveau du gameplay je n’ai quasi aucune remarque à émettre, on a une interface complète une évolution de personnage intéressante que l’on peut contrôler de A à Z. L’espace de stockage ultra limité qui force à faire des choix de matériel intéressant au cours du jeu nous rappelle la difficulté de stocker des objets dans les jeux d’il y a quelques années, ramenant un sac à un sac et pas une poche sans fond. Toutes les fonctionnalités sont à portée de main, le couvert est déstabilisant du fait de son passage en troisième personne mais devient rapidement quelque chose qu’on apprécie !J’ai une seule et grosse remarque ce sont les boss, des combats frisant l’inutilité qui vont exiger une technique en boucle, bref, un passage ennuyeux qu’on souhaite passer en accéléré.
Le Gamedesign est selon moi le point le plus réussi du jeu et permet au Gameplay de gagner en puissance. Comme le jeu peut se jouer de bien des manières (à la bourrine, minigun sous le bras, ou en mode infiltration, en évitant soigneusement tout contact visuel), il fallait faire des chemins différents pour chaque type de jeu. Non seulement ce point-là est réussi, mais Deus Ex se permet le luxe de nous faire ressentir cette soif d’exploration que l’on ne retrouve que dans les RPG de renoms, The Elders Scrolls en tête.
Car, là où un jeu classique proposerait 2 ou 3 chemins différents, Deus Ex donne une liberté totale sur le mode d’avancée dans les niveaux du jeu. Vous êtes un explorateur, fouillant chaque recoin d’une ville avant de commencer la quête principale ? Bien joué, vous récupérerez les mots de passes bloquant les accès plus facilement. Vous préférez vous la jouer ninja, et assassiner chaque ennemi sur la map ? Avec pas mal de sang-froid et de maîtrise, vous pourrez. Vous voulez être un fantôme, et faire passer l’IA pour une idiote ? Pas de soucis, passez par les conduits d’aérations et piratez les tourelles de contrôle pour passer totalement inaperçu. Chaque mode de jeu est faisable, certains plus difficile que d’autres, mais toujours à la portée du joueur patient.
J’interviens ici car j’ai eu cette soif d’exploration, mais j’ai fait un triste constat. La vie a quitté les rues, pas d’animations, pas de surprise. Bien que l’ambiance cyberpunk soit omniprésente, vous évoluez dans un univers figé qui ne comporte aucune circulation et des personnages qui ne changent définitivement jamais de position… et qui s’empresseront de passer un coup de fil quand ils vous auront répété leur phrase quatre ou cinq fois.Certains me diront que c’est dans la lignée des Deus Ex, je leur répondrais que plus de dix années se sont écoulées, il est regrettable de ne pas avoir pensé à l’expérience utilisateur et d’avoir complétement oublié de crédibiliser un univers bien pensé et dessiné. Le détail c’est la vie, que ce soit dans le web ou dans les jeux, l’utilisateur est adepte de petits détails. Certes on trouve quelques références, ce qui fait toujours marrer le joueur, mais on a pas d’autre intérêt à fouiller que de tomber sur une upgrade bien planquée…En revanche les mission d’infiltrations de base ou autres bâtiments sont un délice de level design qu’on ne peut déguster qu’en plusieurs parties ! Les endroits sont vastes et même si vous n’avez souvent pas le temps de visiter ce sont de vraies passoires comme tout bon gros complexe !
Le jeu vous encourage d’ailleurs à passer par des détours plutôt que par le chemin principal. Vous récupèrerez notamment des points d’expériences (nécessaire pour améliorer vos augmentations), des crédits et surtout des accès à certains éléments clés lors de la progression. Et, vous le verrez par vous-même, foncer dans le tas est rarement efficace, les balles font très très mal, notamment au plus haut niveau de difficulté. La furtivité est souvent préférable, mais là encore, vous aurez le choix de tuer ou non les ennemis durant le jeu. Bref, vous l’aurez compris, vous avez le choix, et c’est suffisamment rare pour devoir être signaler.
Conclusion
La digne suite de Deus Ex
Pour moi, Deus Ex : Human Revolution s’impose comme l’une des meilleurs sorties de cet été, et de cette année. Malgré une IA assez inégale et des tares techniques évidentes, on ne peut qu’être pris dans cette histoire incroyable et cette ambiance particulièrement maîtrisée. Et cela prouve bien une chose, c’est que le jeu solo n’est pas encore mort, et qu’il a encore bien des bijoux à nous faire découvrir.
Un jeu agréable et qui nous offre un bon préquel à l’histoire de Deus Ex, malgré quelques lourdes lacunes qui pour moi ne le feront pas passer pour le jeu de l’année. Mais je me dois de saluer l’effort pour l’histoire et les options de gameplay, chose qui manque cruellement de nos jours. Le manque de détails avéré m’aura déçu également car dans un univers immersif, l’inutile devient rapidement indispensable.
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